Dossier

Dir en grey : De Missa à Vulgar

01/07/2003 2003-07-01 12:00:00 JaME Auteur : Tanja

Dir en grey : De Missa à Vulgar

Ce dossier fut publié dans le journal Japan Vibes


© Free-Will
Dir en grey a su imposer son image dans le milieu visual kei depuis 1998, passant d’un style à l’autre. Ils savent, avec subtilité, donner une autre dimension aux artistes qui les influences et par la même construire une musique bien à eux. kaoru déclarait :le groupe n'était pas là pour changer le monde ou créer une nouvelle race humaine, juste s'éclater entre potes. Entrons dans leur univers…

Les débuts
Tout débute, en 1996, par le groupe La:Sadie’s créé par quatre des membres actuels de Dir en grey. La notoriété de ces 5 jeunes garçons est importante et ils se font remarquer assez vite dans le milieu indépendant. Ils sortent principalement des demo tape et deux CD. Leur son a l’époque est fortement inspiré des premiers albums de Kuroyume indies. Cela reste intéressant mais encore trop impersonnel. Coup du sort, début 1997 c’est la séparation, l’entente entre Kisaki, le bassiste et le chanteur n’est pas au beau fixe. Pourtant Kyô ne laisse pas de côté son désir de continuer le groupe et contacte dans la foulée un ami bassiste de Nagano : Toshiya. Ce 5e élément trouvé : Dir en grey est né. On retrouve au chant : Kyô, aux guitares : Kaoru et Die, à la basse : Toshiya et à la batterie : Shinya.

Le son punk très sombre et agressif séduit rapidement les fans. Leur premier travail sera de sortir Missa, un mini album qui pose les bases musicales du groupe. A l’époque (juillet 1997) c’est une bombe qui sort chez East West Japan. Mais ne serait-ce pas leur futur maison de disques major ? C'est Tommy Dynamite (ex. Color et patron du label Free will) qui est leur producteur exclusif et qui le restera jusqu’à aujourd’hui.
Le 15 décembre sort leur 1er vidéo de clip ~Kaede~ if trans... Ils sont glauques, morbides, déconseillés aux âmes sensibles.

Le 5 mai 1998 sort un maxi Jealous, le son est plus travaillé et la mélodie mise en avant. Mais c’est le single suivant qui révélera le groupe. -I'll- est une déception, pour les fans français de l’époque car elle est pop rock, à cent lieux des précédentes productions. Par contre au Japon la chanson vient se classer 7e dans les charts major – alors que c’est un CD indies ! – devançant l'ancien record obtenu par Vanishing vision de X, 12e à l'époque de sa sortie. Partout dans les journaux on ne parle que d'eux et du phénomène qu'ils entraînent, leur mauvaise réputation leur collant déjà à la peau.

Le 23 septembre sortent simultanément deux K7 vidéos : Môsô Tôkaku geki (clips) et Môsô kakogoi geki (historique de leur carrière avec de méchants " petits " bouts du live au Nakano Sun Plaza). La tournée Deep [sink], Deep [gaze], Deep [agonize], Deep [-] commence au mois d'octobre au Nagoya Bottom Line pour se terminer le 2 novembre au Nihon Budôkan. Dir en grey fait ses adieux au milieu indies devant 10 000 personnes dans une des salles les plus mythiques du Japon. Le concert Deep [sink], Deep [gaze], Deep [agonize], Deep [-] Final More Deep [sympathy] meet evil with evil~ est un succès ! Il est sold out (complet).
Les débuts major.
Lors des interviews, ils commencent à parler de leur passion pour le groupe mythique du mouvement visual kei : X-Japan... Puis juste après leur dernier concert indies, on apprend que Yoshiki va produire leurs premiers singles. Là encore cela fait les gorges chaudes des journaux à scandales japonais. Ils partent à Los Angeles pour enregistrer et faire quelques photos que nous retrouverons dans tous les magazines. Ensuite, ils partent en Italie tourner les clips correspondants.

Ils débutent leur carrière major, le 20 janvier 1999, avec trois singles : Yurameki, Akuro no Oka et Zan. Le son change, il est plus mûr, plus structuré et les mélodies ultra accrocheuses. On notera la petite prise de risque qu’est ZAN. Cette chanson est violente à souhait. Ils l’interpréteront lors de leur 1er passage télé à Music station sauf qu’elle n’était pas adaptée à l’émission. Effet garanti sur la présentatrice au côté de Tamori-san. Mais au moins le groupe s’est fait remarquer immédiatement. Les singles sont respectivement arrivés 5e, 6e et 7e à l'Oricon.
Le 26 mai c'est au tour de Cage, une pure merveille toujours produite par Yoshiki, de sortir dans les bacs. Il arrive 6e à l'Oricon. Le 14 juillet sort Yôkan leur 5e single qui lui n'est plus produit par Yoshiki. Il est lui aussi classé 6e à l'Oricon. Le ton est donné : pop rock, combinant chant ultra mélodique et guitares en arpéges. L’univers de dir en grey s’est métamorphosé en un an, mais il ne faudrait pas laisser de côté les textes de Kyô : Yurameki, Yôkan comme Cage sont bien plus sombres que le laisseraient penser les mélodies. Si il parle d’amour, ce sera rarement pour en dépeindre une vision fleur bleue, mais plutôt tragique voir malsaine.

Gauze (titre donné par Shinya) leur 1er album sort le 28 juillet et se classe 5e à l'Oricon. Les musiques sont différentes plus mélodieuses, plus attractives. Cet album restera le plus accessible de leur carrière. Gauze est un savant mélange musical, mêlant pop rock, punk, goth et metal. Kyô nous offre des textes écorchant la société en général, abordant des sujets divers comme : l’avortement (Mazohyst of decadence), la politique (Mask), la mort (304), le viol (Tsumi to batsu), l’amour (Yurameki, Yôkan, akuro no oka…) etc.
C'est sous un titre encore plus énigmatique que sort leur vidéo de clips. Gauze -62045- n'est pas une simple compile de clips tirée des singles. Non, c'est carrément l'album entier que l'on retrouve en vidéo. Les clips sont de bonnes qualités reflétant l’univers noir et chaotique du groupe. On restera difficilement de marbre devant Cage ou raison detre à l’arrière goût amer.
L'année 99 se termine en beauté le 18 décembre par un concert à l'Osaka Jô Hall. Le 16 février suivant le concert sort dans le commerce en même temps que leur nouveau single : Myaku, suivi le 7 juin par KR [cube] et enfin Taiyô no ao le 26 juillet. Ce dernier maxi, gentiment pop rock, refroidira plus d’un fan qui voit là un signe d’assagissement du groupe. Ils ne savent pas encore à quel point ils ont tort.

L'album Macabre sort le 20 septembre. A noter qu'à partir de cet album ils passent de East West Japan à Sony. Ils arrivent 4e à l'Oricon. Cet album est un cran au dessus, ils retrouvent leur côté sombre et ouvrent leur musique à des nouveaux sons. Pourtant il paraîtra mal calibré et pas assez intuitif. Malgré tout cela il reste excellent. Notre petit démon chanteur explore d’autres thèmes comme le suicide (Ryû/Wake), l’amour perdu (Zakuro), la folie (macabre), la drogue (egnirys cimredopyh + an injection) ou même la seconde guerre mondiale (Keika). Les textes sont forts et l’interprétation à la hauteur. Je défis quiconque de ne pas avoir un nœud à l’estomac quand Kyô chante Zakuro en live.

Le 9 septembre débute la nouvelle tournée, mais Kyô en sortant de scène se sent mal, il est immédiatement conduit à l'hôpital. Les médecins diagnostique un problème à l'oreille et lui préconisent le repos, obligant le groupe à reporter la tournée au mois de janvier. Il lui faut éviter les bruits lourds ce qui paraît mal engagé lorsqu’on connaît leur musique. Le groupe va mal et ils ont tous peur de devoir dissoudre dir en grey si Kyô ne peut plus remonter sur scène. Car ils ne peuvent continuer sans leur chanteur. Malgré tout, la seconde partie de la tournée débute en décembre. Tout ce passe bien jusqu’à ce qu’une rechute l’oblige désormais à porter un appareil qui l’isole des bruits agressifs. Kyô avoue avoir eu du mal au début, mais il s’y est habitué. Lors d’interview il ajoute qu’il a l’audition d’un homme âgé, ce qui prouve bien qu’il faut faire très attention à ses oreilles et ne pas faire de concert sans protection (aussi bien en tant que musicien qu’en tant que spectateur).

Le 18 avril 2001 ils sortent ain't afraid to die, un nouveau maxi, suivi d'un concert : TOUR 00>>01 Macabre Final More Deep [quake] au nihon budôkan le 27 avril 2001. Le 25 juillet sort une vidéo document TOUR 00>>01 Macabre qui est un résumé de toute la tournée. Il est bien dommage qu’un seul morceau soit en entier, mais les fans y trouveront leur compte en ce qui concerne les back stages (coulisses). Le 12 septembre c'est au tour de Filth (grossièreté) de sortir dans les boutiques, suivi de Jessica qui se place 9e à l'ORICON et enfin embryo sort le 19 décembre. Pendant ce temps ils font leur promotion à l’étranger et notamment à Hong Kong. Ils promettent une tournée en Asie pour bientôt, mais les événements du 11 septembre refroidissent la production et le projet est reporté pour l’année suivante.

Kisô leur dernier album en date sort le 30 janvier 2002 et arrive 3e à l'ORICON. Il s’est moins bien vendu que Gauze, mais il révèle leurs vraies envies musicales. Le son est bien différent, plus lourd, plus américain, plus neo metal, mais ils gardent la touche Dir en grey. Les concerts sont quant à eux, devenus de véritable tuerie. Des tracts et des annonces sont diffusé sans cesse pour éviter les accidents. Pour en revenir au CD, je dois dire que la première fois que je l’ai écouté je me suis dit… « Mais elles sont où les mélodies ? » Quelques écoutes plus tard je rentrais enfin dans ce nouvel univers, fusion parfaite entre la fureur électrique et électronique. Petit plus non négligeable de la version collector, il y a deux livrets : un en anglais et un autre en japonais –celui-ci est caché-. Il permet une approche concrète des textes de Kyô, là encore ce n’est pas rose, il nous plonge dans l’inceste (embryo), le suicide (bottom fo the death valley), ou encore l’amour toujours autant torturé (24ko cylinder, mushi…).
Kimon leur compile de clips sort le 20 mars. Six Ugly et Child Prey sortent simultanément le 31 juillet 2002 et continuent dans la lignée neo metal. Avec tout de même quelques relents punk dû à Kyô. On sent que le groupe se fait plaisir pour pouvoir se lâcher en live, sans pour autant mettre autant de soins aux musiques et aux paroles. Notons tout de même le hit qu’est Umbrella !
Après cette montée tout crescendo vers une musique plus bruyante, Drain away semble un parfais compromis entre les riffs de guitares lourds et la dir en grey’s touch sur le refrain. Kyô avait déjà fait remarquer dans une interview qu’il aimerait chanter, sous entendu ne pas ou peu hurler. Gageons que l’album à venir soit du même cru.

Qui sont-ils ?

Kyô est le chanteur, l’âme du groupe, qui insuffle son univers morbide et dérangeant, pour autant ces paroles ne sont pas revendicatrices et il ne veut pas être considéré comme un porte parole de la jeunesse japonaise. Il possède une voix unique qu’il a su travailler au fils des années. Certains la trouveront inécoutable, d’autres lui trouveront une force inimitable. Chant ultra mélodique, hurlements ou voix agonisante, Kyô interprète ses chansons avec toute l’émotion qu’il lui est possible de donner. Il compose peu ([S], The Domestic Fucker Family et HADES), mais signe tous les textes d’une main de maître. Il a sorti en septembre 2000 un livre, Jigyaku, rensô cinéma, incluant un CD qui comporte 4 titres, dont la suite de 304 gô shiroi shin no sakura. Son jeu de scène est aussi un énorme atout. Mais chose encore plus remarquable il évolue. Il invente, s’amuse et étonne toujours le public. Des chorégraphies d’automates scotché à son micro, il évolue maintenant vers une gestuelle désordonnée et n’a de cesse de bouger comme un fou. Il aime aussi la provoque, vomissant parfois un liquide visqueux blanc ou rouge sang, ou bien, se caressant ou encore arrive sur scène totalement recouvert d’une épaisse couche de peinture spéciale se craquelant au moindre mouvement. Caractère fort, il est direct (ce qui est rare chez un japonais), règle ses comptes dans les interviews et n’hésite pas à faire taire le public lorsqu’il interprète ses morceaux préférés. Il est très influencé par le chanteur Kiyoharu (Sads, ex. Kuroyume), tant au niveau du look que de la musique.

Kaoru est le premier guitariste, mais aussi le leader et principal compositeur. On lui doit : Hydra, Cage, macabre ou encore embryo. Ses influences sont à la fois japonaises, c’est un grand fan de hide, de Balzac ; mais aussi occidentales avec Limp bizkit, et autres groupes de neo metal ou de punk.

Die est le second guitariste et compose parmi les plus belles mélodies du groupe : Yôkan, 24ko Cylinder, Audrey, Drain away. Il est très drôle, et il s’amuse beaucoup a embêter Shinya.
Toshiya est lui bassiste, et sait imposer de bonnes lignes de basses : egnirys cimredopyh + an injection, Bottom of the death valley, mais excelle aussi dans les compos des autres comme les inoubliables solos de Cage et Akuro no oka. C’est un fan inconditionnel de J (ex. Luna Sea) bassiste de son état. C’est sans conteste le plus beau du groupe (à part sa dentition, mais s’il imite J, ce sera parfait).
Pour finir Shinya reste le plus effacé de la bande, à qui l’on doit quelques bons morceaux (umbrella, yurameki etc.). Mais il n’en reste pas moins énigmatique et cacherait en fait bien son jeu.

CONCERTS

Les concerts de dir en grey n’ont jamais eu bonne presse au Japon. Entendez par là que c’est pas de tout repos pour le public. Des tracs sont distribués massivement pour inciter les fans à faire attention à leur voisines. Les concerts dans les salles dites « all seat » (c’est à dire avec des sièges - mais on est pas pour autant assis -) sont calmes. Mais dans les « all standing » (live house de 300 à 2 000 places), c’est une autre histoire. Déjà la compression est énorme, mais le pire ce sont les slameurs. On a tous vu des gens se faire porter par le public dans les concerts de rock, rien de bien méchant. Mais là c’est une autre histoire. Elles ou ils arrivent par le fond et remonte vers la scène en s’agrippant aux gens tout en leur passant dessus. Cheveux longs s’abstenir. Si vous n’êtes pas sur leur chemin le concert sera grandiose, sinon vous souffrirez, surtout si comme moi vous n’êtes pas de taille à les faire passer…
Malgré ce public plus qu’enthousiaste, leurs concerts sont vraiment une chose à vivre ! On headbangue, on reprend les chorégraphie de Kyô, bref il s’agit d’un véritable échange entre le groupe et son public.

Dir en grey est un groupe à découvrir de toute urgence si ce n’est pas déjà fait. Leur prochaine album devrait sortir dans quelques mois ainsi que le DVD de leur final tour au Yokohama arena du 11 janvier 2003.

Japan Vibes 6 (Juillet - Aout 2003) - Disponible à cette adresse : http://www.japan-vibes.com/
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